Transparence des données: Pourquoi la réversibilité est-elle indispensable ?

byaugustinm
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Confiance en déclin

Une étude de Capgemini publiée le mois dernier fait le point sur l’immense impact que pourrait avoir l’IA sur les entreprises du retail. Les grands distributeurs ont pris conscience des opportunités offertes par l’IA mais ne savent pas encore bien se préparer à son déploiement à l’ensemble de leur chaîne logistique. La bonne nouvelle, c’est que les entreprises développent une meilleure compréhension des enjeux de l’IA, et évaluent mieux leurs propres capacités à mettre en oeuvre une IA, ainsi que les difficultés à y parvenir.

Mais cette prise de conscience crée un contexte d’incertitude parmi les entreprises: en 2017, plus de huit distributeurs sur dix avaient confiance en leur écosystème de données pour mettre en œuvre l’IA. Aujourd’hui, ce pourcentage est tombé à 55 %, et l’on peut supposer que ce constat ne concerne pas seulement les distributeurs mais également de nombreuses filières d’entreprises. Le doute croissant des entreprises à être capable d’implémenter une IA à grande échelle doit absolument être levé car il s’agit de projets à forte portée stratégique qui représentent un gain financier considérable ainsi qu’une opportunité de création d’emplois. En effet, l’étude de Capgemini estime que les entreprises du retail pourraient économiser 300 milliards de dollars grâce à l’IA si elle était déployée à grande échelle, et 71% des entreprises interrogées affirment que l’IA a conduit à des créations de postes.

La réversibilité, une solution potentielle

Afin de remédier à cette situation d’incertitude, il existe un concept clé : la réversibilité.

La réversibilité est, dans les contrats informatiques, la faculté pour le client de récupérer ses données lors de la cessation du contrat avec son fournisseur, ou plus généralement la faculté de reprendre, au terme du contrat, l’exploitation des données ou d’un logiciel dans le cadre d’une migration chez une autre infrastructure informatique. Beaucoup de contrats aujourd’hui ne contiennent pas de clauses de réversibilité, ni aucune clause prévoyant le sort du client, de son système d’information et de ses données, à la fin du contrat. Le client se trouve alors ‘captif’ d’un prestataire souvent réticent à le laisser partir car celui-ci gagne à s’approprier le plus de données possibles et ce particulièrement dans le secteur de l’intelligence artificielle. En effet, en agrégeant les données de plusieurs clients, le fournisseur d’IA peut développer des réseaux de neurones plus performants qu’il pourra ensuite revendre à d’autres clients, augmentant ainsi considérablement son chiffre d’affaire.

Pourtant, il est essentiel pour les entreprises qu’elles puissent garder la propriété de leurs données, que ce soit pour des raisons stratégiques d’avantage concurrentiel (elles ne souhaitent pas que d’autres entreprises aient accès aux mêmes services qu’elle, qui, de surcroît, seront meilleurs en partie grâce à leurs données) ou pour des raisons de liberté et de flexibilité dans la construction de leur propre solution informatique: le client doit pouvoir être libre de construire son projet comme bon lui semble, avec un fournisseur ou à domicile. Aussi, dans le cadre d’un projet développé en externe, il doit avoir la liberté de pouvoir reprendre ce projet en interne et mettre à jour les IAs, même après que le projet soit terminé. Seul le droit à la réversibilité peut garantir une telle protection au client.

IA & réversibilité

À quoi correspond donc la réversibilité dans le cadre spécifique de l’intelligence artificielle?

Grâce à ce qu’on appelle ‘l’apprentissage supervisé’, les réseaux de neurones des entreprises sont entraînés sur de grands jeux de données. Cette forme d’apprentissage est, pour l’instant, celle qui a su le mieux apporter des solutions aux entreprises pour entraîner des IAs industriels. Comme la force de l’IA réside dans sa capacité à consolider en continue des jeux de données, et à sélectionner de meilleurs réseaux de neurones afin de concilier performance et capacité d’implémentation, il nous semble primordial que les entreprises puissent être propriétaires de leurs jeux de données. C’est uniquement sous ces conditions, et au nom de la réversibilité, qu’elles vont pouvoir faire évoluer leurs IAs dans le temps avec la liberté de pouvoir changer de méthode ou de sous-traitants comme elles le souhaitent.

Article publié dans le blog d’Augustin Marty sur l’Usine Nouvelle.

Augustin Marty est le PDG et co-fondateur de deepomatic, start-up spécialisée dans le développement de solutions de reconnaissance d’images pour les industriels. Diplômé de l’Ecole nationale des Ponts et Chaussées, il a créé sa première entreprise en Chine à l’âge de 22 ans, puis a travaillé notamment pour Vinci Construction sur la vente et la conception de projets d’ingénierie.

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