L’IA, menace ou opportunité ?
Beaucoup de choses se disent sur l’Intelligence Artificielle (IA), une technologie en pleine croissance qui mêle fascination et crainte dans l’imaginaire collectif. Si les grandes entreprises technologiques ont tendance à promouvoir l’idée que l’IA aura un impact bénéfique sur le travail, beaucoup craignent de voir leurs emplois menacés, notamment par la robotisation et s’en méfient. Les robots sont-ils donc créateurs ou destructeurs d’emplois? Selon Lee Kai-Fu, président de l’institut Sinovation Ventures Artificial Intelligence, le mécontentement social est justifié et il prédit une très forte disparition d’emplois à la faveur des machines, tels que les services à la clientèle, les hôtes d’accueil, les chauffeurs, et autres métiers de cols bleus et de cols blancs (MIT Technology Review). Il estime que ce sera la transition la plus rapide que l’humanité ait connue, et que nous ne sommes pas prêts pour cela.
Mais son opinion est contestée et des études affirment, preuves à l’appui, que les robots créent de l’emploi dans les entreprises. Faisons attention aux idées reçues, et par exemple, ne pensons pas que l’automatisation de l’industrie est nécessairement corrélée à une augmentation du taux de chômage. Une étude de Mandarine Gestion en 2017 montre que les pays dont le ratio de robots par ouvriers est le plus élevé (Allemagne, Suisse, Japon, Corée du Sud) sont aussi ceux où le chômage est le plus bas. Le rapport observe que la robotisation réduit le coût du travail, améliore la logistique et permet à la production locale de redevenir concurrentielle. Au final, en 2016, des experts de l’OCDE ont tranché: seulement 9 % des travailleurs français présenteraient «un risque élevé de substitution» par l’intelligence artificielle.
Il y a donc un risque réel de disparition de certains emplois, mais celui-ci reste mesuré, et la transition vers une société de l’IA offre de nombreuses possibilités professionnelles.
Quels sont donc les nouveaux métiers de demain?
Il est certain que le monde du travail sera de plus en plus impacté par l’IA, et que certains métiers ou secteurs disparaîtront alors que d’autres verront le jour. Il faut s’y préparer dès à présent et former nos étudiants et nos travailleurs aux métiers du futur car l’IA se développe très rapidement, touchant déjà la génération de travailleurs actuelle.
Parmi les “métiers du futur”, on pense d’emblée aux data scientists et aux chercheurs en intelligence artificielle qui sont, en effet, très convoités. Mais il existe bien d’autres compétences moins élitistes et tout aussi nécessaires liées à l’IA. Côté développement informatique, il faut des spécialistes en IA appliquée au monde de l’entreprise. En effet, ces spécialistes répondront aux besoins plus concrets et pratiques du milieu de l’entreprise que ce qu’offre la recherche universitaire ou les écoles d’informatique, qui assurent, encore aujourd’hui, des formations très théoriques.
Des nouvelles formations adaptées
Les entreprises en France font d’ailleurs part d’une pénurie de talents et s’impliquent davantage dans les cours et les programmes de formation sur tous les sujets du numérique. Mentionnons notamment le partenariat entre Microsoft, Orange Cyberdefense et l’ECE (école d’ingénieurs informatique et généraliste), IBM et leur initiative IBM France Academy, l’école LDLC ou encore Stage301 crée par Klaxoon, MV Group et HelloWork. Ces sociétés interviennent de plus en plus dans le monde académique pour proposer des formations destinées aux demandeurs d’emploi, aux décrocheurs scolaires et aux personnes en reconversion professionnelle. C’est ce qu’à fait Microsoft en collaboration avec Simplon (entreprise sociale et solidaire de formation au code), en créant une école alternative baptisée l’École IA Microsoft à Issy-les-Moulineaux.
L’école vise notamment les personnes issues des quartiers populaires, peu diplômées, et les femmes. L’idée est de former des artisans et des techniciens de l’IA, avec un niveau Bac+2, Bac+3, qui seront amenés à travailler avec les data scientists de niveau Bac+5 à Bac+8. Ces formations répondent aux besoin des métiers intermédiaires, car les entreprises peinent à recruter des personnes sachant nourrir et entraîner les nouveaux moteurs de l’économie. Microsoft voit en l’IA un vecteur d’inclusion, et dit s’inscrire dans une démarche globale de développement de l’écosystème numérique français pour former aux divers métiers du futurs.
De nombreuses nouvelles possibilités de carrière avec l’IA
Par ailleurs, construire une intelligence artificielle nécessite la construction d’un bon jeu de données. Il faut donc un certain nombre de “managers de données” pour le construire et le contrôler, tels que des annotateurs (à l’origine de la construction du jeu de données), des experts en ontologie (pour structurer les jeux de données, définir les différentes classes et garantir l’efficacité du jeu de donné) ou encore des contrôleurs de performance (pour tester les algorithmes) et des contrôleurs éthiques (attentifs aux risques de biais sexistes, racistes ou autres). Ici encore, ce sont des métiers dont les compétences peuvent s’acquérir de manière rapide et efficace, et qui offrent de nombreuses possibilités d’embauche aux techniciens de demain.
Enfin, pour accompagner la transition numérique et gérer les bouleversements qu’elle risque d’engendrer, mentionnons la demande croissante de consultants en conduite du changement ou spécialistes des applications commerciales de l’IA. Leur but est de faciliter la transition numérique qui s’opère à l’échelle de toute la société et préparer les entreprises à s’équiper et à transmettre l’intelligence artificielle (notamment dans les pôles de recrutement et de formation) afin de s’adapter au monde de demain.
C’est aujourd’hui que le futur se prépare, j’invite donc les entreprises à réfléchir dès à présent à leur mutation numérique, à l’évolution inévitable de leurs ressources humaines et aux bénéfices qu’elles peuvent en tirer: contribuez à créer les métiers de demain !
Article publié dans le blog d’Augustin Marty sur l’Usine Nouvelle.
Augustin Marty est le PDG et co-fondateur de deepomatic, start-up spécialisée dans le développement de solutions de reconnaissance d’images pour les industriels. Diplômé de l’Ecole nationale des Ponts et Chaussées, il a créé sa première entreprise en Chine à l’âge de 22 ans, puis a travaillé notamment pour Vinci Construction sur la vente et la conception de projets d’ingénierie.